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Ecoute de musique avec oreillettes, vidéos sur tablette, musiques « gaming »…les jeunes sont de plus en plus connectés, écouteurs rivés sur l’oreille et de plus en plus tôt. 100% des plus de 15 ans sont équipés de smartphones et le taux d’équipement progresse chez les moins de 11 ans. Les oreilles sont mises à rude épreuve. Quelles incidences sur leur santé ? Comment éviter les comportements addictifs ? Comment éviter les gênes et troubles de l’audition pouvant modifier la trajectoire de santé et de vie sociale de notre enfant ?


Oreilles sur-sollicitées,  attention à la fatigue chez l’enfant

Les mécanismes de l’oreille sont limités dans leur capacité d’absorption des intensités sonores et de leur longévité. Les expositions sonores actuelles se caractérisent en effet par leur puissance mais également par leur durée au cours d’une journée. Les deux caractéristiques cumulées augmentent le risque auditif : survenue de symptômes ORL (acouphènes) et surdités. Mais pas que…Le cumul des expositions sonores intervient également. Aussi, l’environnement de vie de l’enfant est à considérer : bruit dans la rue, bruit dans la classe, bruit au restaurant scolaire, bruit à la maison et l’écoute nomade de musique,  musique gaming sur l’ordinateur. Les temps de récupération sont alors réduits. Les oreilles sont sur-sollicitées au travers d’un stress acoustique régulier voir quasi continu lorsque certains enfants s’endorment avec les écouteurs. Ce n’est donc plus uniquement le risque de traumatisme sonore aigu (TSA) qui est à craindre mais le risque de Traumatisme Sonore Chronique (TSC). La proportion des 15 ans-17 ans déclarant des symptômes acouphènes a augmenté de 10 points entre 2018 et 2019.

Ce stress acoustique modifie la qualité de la chaîne de transmission des informations au cerveau, qui lui, a la charge de décoder. Plus le stress acoustique exercé sur les cellules sensorielles de l’oreille est grand et moins votre enfant va comprendre instantanément la parole. C’est alors que l’état général de santé est perturbé. Avec les difficultés de compréhension de la parole surgissent les pertes de concentration et la fatigue.

D’ailleurs, 56% des 15 ans et plus déclarent avoir ressenti des maux de tête, 58% des problèmes de concentration, 64% le sentiment d’être plus nerveux et 83% le sentiment d’être fatigué (source : Enquête JNA Les oreilles des Français sous pression : quels impacts sur la santé ? - mars 2019).

Rappelons que les mécanismes de l’oreille sont au cœur de 3 fonctions essentielles à l’équilibre de santé et de vie sociale au quotidien : l’alerte, la communication, les émotions.

Dans ce contexte général, les enfants sont-ils en pleine possession de leurs capacités pour intégrer les apprentissages ?

Oreilles sur-sollicitées, attention au vague à l’âme chez l’adolescent

Selon le Docteur Caroline Demily, médecin psychiatre spécialiste de la transition enfants/ adultes au sein de l’hôpital Le Vinatier à Lyon, il est nécessaire de rester vigilant au mode de consommation de musique en mode « ermite ».

En effet, l’adolescence correspond à une période particulière du passage de l’enfance à l’adulte. Françoise Dolto évoquait le « complexe du homard » pour décrire cette période particulière. « L’enfant se défait de sa carapace, soudain étroite, pour en acquérir une autre. Entre les deux, il est vulnérable, agressif ou replié sur lui-même » indiquait Françoise Dolto.

L’écoute de musique participe à la mue. Elle aide l’adolescent à se confronter à ses états émotionnels, à les partager dans son groupe de copains. Grâce à elle, il part à la connaissance de soi, se confrontant parfois à une tristesse profonde en fonction de ses confrontations sociales et à sa vulnérabilité. Cette mue est parfois difficile et difficilement partageable avec ses parents dont on doit peu à peu se détacher pour devenir adulte.

Les oreillettes offrent un fabuleux outil pour contrôler la relation : être avec ou être sans. Mais pour certains, cela peut constituer un refuge, un prétexte à repli sur soi, à fuir la relation aux autres qui peut faire violence ou qui demande à sortir de sa coquille.

Votre adolescent peut alors se perdre dans les méandres intérieurs l’amenant à développer une mélancolie ou venant à la renforcer.

L’écoute prolongée est aussi facteur de fatigue chronique chez l’adolescent, renforçant la possibilité de symptômes dépressifs.

Que faire alors ?...

Le dialogue constructif permet de mettre des mots sur une éventuelle souffrance qui se cache derrière ce comportement d’écoute. Et si le dialogue est difficile, ne pas hésiter à faire appel momentanément à un professionnel pédopsychiatre ou psychologue.

Les signes visibles sont la baisse des résultats scolaires, une fatigue généralisée, le manque d’appétit, l’envie des « autres » qui décline.

En général, ces symptômes sont passagers mais sont à prendre en considération lorsqu’ils perdurent.

Oreilles en difficultés non repérées, attention aux troubles des apprentissages

Lorsque l’oreille est en difficulté, c’est alors que l’enfant fait répéter, ne réagit pas spontanément dans les conversations ou paraît distrait ou agité en classe. Il est alors nécessaire de penser à intégrer le bilan complet de l’audition chez le médecin spécialiste, le médecin ORL.

Grâce à un diagnostic approfondi, l’ORL pourra éventuellement écarter l’hypothèse d’un trouble du traitement auditif central (TTAC).

Le TTAC est aujourd’hui volontiers évoqué chez un enfant en difficulté scolaire et qui aux dires, de ses parents, présente des difficultés d’écoute alors qu’un premier bilan ORL s’est avéré négatif. Le TTAC n’est pas repérable par simple dépistage tonal. 8% des individus seraient concernés et plus particulièrement au sein de la population des enfants diagnostiqués « Dys ».

Un enfant avec trouble du « traitements auditif central » :

  • a du mal à prêter attention à ce qu’il entend et mémorise difficilement une information présentée oralement. Il est donc en difficulté chaque fois qu’il doit suivre des consignes données uniquement à l’oral, surtout si elles sont multiples et énoncées rapidement.
  • est facilement distrait ou anormalement gêné par des bruits venant de l’environnement (« bruit de fond » intenses ou d’apparition brutale) ; les enfants avec TTAC sont souvent décrits par leurs enseignants comme de faibles auditeurs en présence de bruit.
  • converse difficilement dans des environnements bruyants (magasins, restaurants, voiture …) mais se sent plus à l’aise dans le calme
  • est gêné pour comprendre et suivre les conversations, plus particulièrement lorsqu’elles sont longues et en présence de bruit ou plusieurs locuteurs ; il adopte alors une attitude passive dans la communication
  • a des problèmes pour suivre les conversations téléphoniques
  • n’est jamais certain de ce qu’il entend et questionne souvent « Quoi ? » ou « Hein ? »
  • se caractérise par une lenteur dans ses réponses orales qui sont par ailleurs souvent inappropriées
  • apprend difficilement des comptines ou des chansons et présente peu d’appétence pour l’apprentissage de la musique
  • apprend difficilement les nouveaux mots et les langues étrangères
  • a du mal à prendre des notes
  • peut présenter des problèmes de comportement

Le diagnostic de TTAC repose aujourd’hui sur des explorations audiologiques approfondies.

En Europe francophone est utilisée une batterie de tests comportementaux développée par Demanez et collègues (2003). Ces tests permettent de mesurer plus particulièrement :

  • les capacités d’attention auditive au moyen de tests d’écoute dichotique.
  • Ces derniers évaluent les capacités d’attention dirigée sur chacune des deux oreilles, d’attention partagée entre les deux oreilles, ou encore de déplacement de l’attention d’une oreille à l’autre en demandant au sujet de répéter du matériel linguistique (syllabes, adjectifs, mots dissyllabiques, chiffres) différent entre les deux oreilles mais présenté de manière simultanée sur les deux oreilles,

  • les compétences d’identification phonémique dans le silence et dans le bruit
  • les scores de reconnaissance de la parole dans des conditions compétitives d’écoute
  • les interactions binaurales (test de démasquage)
  • les capacités pour classer les sons sur la base de la fréquence ou de la durée (test de pattern).

L’audiologiste sélectionne les tests à effectuer pour chaque enfant selon l’âge. L’interprétation des résultats doit tenir compte des problèmes de langage, de maîtrise de la langue française et du statut cognitif de l’enfant. Il faut souligner qu’un diagnostic de TTAC est délicat à établir chez des enfants de moins de 7 ans et/ou présentant un retard du développement.

Oreilles source de plaisirs

Les oreilles contribuent à accéder aux plaisirs. L’écoute nomade de musique est à la fois source d’émotions sonores mais également de liberté. Interdire l’écoute risque de provoquer le comportement inverse de celui recherché. Aussi, il s’agit de trouver le bon curseur de la dose d’écoute en développant les bonnes pratiques de santé auditive dans l’éducation à la santé le plus tôt possible. Les parents doivent eux-mêmes se fixer des règles car attention au mimétisme et à l’effet de conformité.

Les adolescents connaissent les risques auditifs mais par besoin d’un espace de repli, par timidité dans la relation à autrui, l’utilisation du smartphone rejoint des considérations psycho-affectives à prendre en compte. Il est donc important de discuter avec son enfant adolescent et d’exprimer la difficulté à être en contact à cause de l’omniprésence du smartphone.

Enfin, il est aussi utile de se questionner sur sa propre relation aux smartphones, à son utilisation de l’ordinateur et de la tablette pour éviter de renforcer les effets de mimétisme et de conformité.

Une bonne hygiène de vie passe désormais par offrir à ses oreilles les temps de récupération qui leur sont nécessaires. Installer des temps de repos auditif au sein de la vie de la famille est aussi un gage de mettre en place les bonnes pratiques pour maintenir une relation de plaisir aux sons et à donner une place aux échanges. Un nouvel adage du bien-être est en passe de s’installer dans votre vie : sortir de la pollution sonore domestique.

Le suivi des oreilles de votre enfant est à intégrer régulièrement dans son parcours de santé. Tout autant que sa santé buccodentaire, que son poids, que sa croissance il est important de suivre l’évolution de ses capacités auditives. Ce suivi peut permettre de réaliser une prévention personnalisée et de contribuer à intégrer l’oreille à l’éducation à la santé et dans d’autre cas, le bilan médical réalisé chez le médecin ORL va faciliter la détection de gênes et de troubles de l’audition afin de mettre en place les solutions adéquates de médiation et de réhabilitation. Ce suivi est d’autant plus important qu’il peut rapidement contribuer à réguler des difficultés scolaires et agir sur la trajectoire de vie de votre enfant.


Dossier réalisé avec les experts de l’association JNA : le Pr. Hung Thaï Van, le Dr. Caroline Demily.

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