Docteur Alain Londero - Médecin ORL à l’hôpital européen Georges-Pompidou (Paris)
Plusieurs études récentes constituent l’actualité de l’acouphène et laissent envisager des progrès notables dans la prise en charge de ce symptôme qui touche, avec des degrés d’agressivité divers, entre 5 et 15 % de la population française.
Objectiver les acouphènes
En faisant passer des IRM fonctionnelles à des patients atteints d’acouphènes invalidants chroniques, des chercheurs américains ont mis en évidence l’existence d’un marqueur biologique qui atteste objectivement de ces acouphènes.
Pour faire simple, ils ont montré que chez ces patients, le précunéus, c’est-à-dire une partie du cerveau impliquée dans les processus attentionnels, est toujours activée. Autrement dit, l’attention des patients est toujours mobilisée par leurs acouphènes.
Une autre étude, menée cette fois en Chine à partir de l’analyse d’enregistrements électrophysiologiques (EEG), va, elle aussi, dans le sens de la mise en évidence de marqueurs biologiques puisque les auteurs ont pu, grâce à une analyse poussée des données EEG, discriminer avec grande probabilité les patients qui ont un acouphène de ceux qui n’en ont pas.
Ces avancées permettent d’objectiver la présence ou non d’un acouphène intrusif.
Mieux mesurer l’intensité et ses impacts
Car, à l’analogue de la douleur, la perception d’un acouphène est très subjective. Elle dépend chez chacun des patients : de ses récepteurs sensoriels, du contexte psychologique, de ses antécédents personnels, etc.
Je ne dis pas que les patients « inventent » leurs acouphènes, mais simplement que nous avons de la difficulté à les mesurer et à les quantifier.
Et que tout progrès en ce sens est essentiel et devrait permettre d’améliorer l’évaluation des thérapeutiques, dont l’efficacité est toujours difficile à mesurer. Ceci est d’ailleurs l’objet d’un projet de collaboration européenne qui vise à harmoniser l’évaluation du symptôme et des traitements.
Des visées thérapeuthiques efficaces
L’enregistrement de l’activité cérébrale EEG et sa visualisation par le patient sous la forme d’une image pourrait faciliter une stratégie de rééducation cérébrale basée sur le neurofeedback.
En voyant l’activité de son cerveau se modifier favorablement, le patient est encouragé par ce résultat positif et entraîné dans un cercle vertueux qui pourrait le soulager de façon pérenne. Une autre actualité de l’acouphène mérite qu’on s’y arrête.
Une expérimentation menée aux USA, utilise avec des résultats très intéressants la stimulation bimodale – on agit à la fois sur le système auditif et sur le système somatosensoriel – pour traiter les acouphènes.